8/06/21
[…] Voilà ce que nous avons découvert en arrivant au mois de juillet, je m’en souviens très bien, un énorme rapport de 500 pages. Nous avons pris connaissance de cette situation qui nous a tout de suite alertés parce que les faits sont graves. Nous avons vraiment littéralement trouvé un établissement qui était livré à lui-même, qui s’était lancé dans une politique effrénée et non maîtrisée de diversification totalement opposée à son modèle naturel qui est un rôle social, comme je l’ai expliqué. Il est vrai que quand nous connaissons aujourd’hui l’ampleur de ce qui s’est passé et de certains prêts qui ont été arrêtés, je n’ose imaginer ce qui aurait pu se passer si l’ACPR n’était pas intervenue en diligentant un contrôle, et si d’ailleurs nous n’avions été élus pour reprendre la situation avec le plus grand sérieux parce que nous avons trouvé vraiment un établissement et des dirigeants qui n’avaient pas l’air plus inquiétés que cela par la situation, et qui semblaient finalement considérer que rien ne pouvait leur être reproché.
Nous avons décidé de prendre cette situation avec le plus grand sérieux parce que, pour le Maire et l’ensemble des membres élus du COS, il nous paraissait important que le rôle social du Crédit municipal soit maintenu, soit pérennisé. Nous estimons que le Crédit municipal, en proposant une offre de crédit aux plus défavorisés, a un rôle dans notre ville qui est très important. Il a aussi un rôle en ce qu’il finance le CCAS, et en cela, nous estimons de notre devoir de remettre au plus vite l’établissement sur de bons rails afin de garantir sa pérennité.
Nous avons, me semble-t-il, joué notre rôle avec conscience en nous disant que nous étions responsables de l’avenir et certainement pas du passé. Ainsi, nous avons mis en œuvre en 9 mois des mesures très substantielles qui ont d’ailleurs été vraiment reconnues par l’ACPR, et nous avons fait tout ce que nous pouvions pour sauver l’établissement et garantir sa pérennité.
– Nous avons commencé par refondre intégralement le COS en le dotant de personnalités bancaires en activité, compétentes avec des compétences très complémentaires nous permettant de nous assurer, nous, élus, qui n’avons pas la connaissance bancaire que tout ce qui se passe dans l’établissement pourra être contrôlé avec la plus grande vigilance possible.
– Nous avons instauré, et le Maire l’a rappelé dès sa première intervention au COS, le fait que les élus devaient participer de manière extrêmement assidue à tous les COS, et depuis le début du mandat, nous avons assisté à l’intégralité des COS.
– Nous avons désigné un nouveau Directeur général, très expérimenté, qui a vraiment une expérience réussie de 10 ans au Crédit municipal de Marseille.
– Nous avons décidé d’emblée par une délibération, de manière très officielle, d’arrêter toutes ces activités… je ne sais pas comment les qualifier, et vraiment de mettre fin à toutes ces offres risquées.
– Nous avons décidé d’indemniser tous les clients qui avaient été victimes d’un mauvais taux d’usure, et nous avons ainsi remboursé 23 sur 26 dossiers. Les 3 n’étant pas remboursés à date étant des dossiers pour lesquels il y a d’autres problèmes de remboursement par ailleurs.
– Nous avons réorganisé, en grande partie, l’établissement en le dotant de compétences qui faisaient cruellement défaut notamment en matière de contrôle, en matière de lutte contre le blanchiment, en matière de conformité.
– Nous avons refondu l’ensemble du corpus procédural. Toutes les procédures à date ont été totalement revues, voire rédigées quand elles n’existaient pas, et l’ensemble des éléments sont aujourd’hui remis sous contrôle.
– Enfin, nous avons apuré autant que possible la situation financière de l’établissement en passant au total pour près de 2,7 millions d’euros de provisions afin de prendre en compte l’ensemble des risques qui, aujourd’hui, sont avérés pour l’établissement.
Par ailleurs, je tiens à le souligner, ce plan de remédiation très ambitieux, très rapide a entraîné des coûts importants, de conseils pour l’établissement, d’avocats et ainsi de suite, de masse salariale puisque l’on a fait des recrutements. Aujourd’hui, entre les provisions passées et ces investissements-là, on peut dire que le coût à date serait de l’ordre de 3 millions d’euros. Cela explique la baisse des résultats que je vous ai commentée précédemment.
Pour en finir, après ce long exposé, où on en est à date, et quelles sont les conséquences puisque je sais que cela avait été une des questions de Monsieur Cazenave, et je pense qu’il est effectivement important d’y répondre. En termes de conséquences, je ne vais pas revenir sur les équilibres financiers, je pense que l’on a tous compris que l’établissement avait été lourdement impacté, qu’il risque de l’être encore sur les 2, 3 prochains exercices, le temps de remettre à flot, de relancer la machine parce que les commerciaux ont tout simplement été déroutés vers ces offres risquées, et du coup, n’ont plus fait leur boulot sur les offres qui étaient le cœur du business du Crédit municipal.
Donc, il faut vraiment maintenant remettre tout le monde sur les bonnes offres, et reprendre la trajectoire commerciale qui existait auparavant. Par rapport aux conséquences financières, aujourd’hui comme je l’ai dit, nous avons provisionné tout ce dont nous avions connaissance, et ce que nous pourrions provisionner à date. Néanmoins, je l’ai expliqué, il y a des prêts qui sont in fine dont le remboursement n’interviendra qu’au terme du contrat. Aujourd’hui, sur ces prêts-là, pour certains, nous n’avons pas de défaillance dans le paiement des intérêts tous les mois. Donc, nous ne pouvons pas constater de provisions sur ces prêts-là quand bien même il y a sans doute pour certains des risques.
Par contre, avec l’estimation que nous faisons, nous savons que le FRBG, le Fonds pour Risques Bancaires Généraux, sera a priori suffisant – on a quand même 9,1 millions d’euros – pour couvrir l’ensemble des risques que nous suspectons à date. Je pense que nous pouvons dire que financièrement, l’établissement a été fortement ébranlé, va encore l’être pendant quelques exercices, mais sa pérennité n’est pas en jeu.
En termes d’images, il a été fortement ébranlé, les articles dans la presse en sont une illustration. On voit qu’en termes d’image, il y a un risque sérieux, et l’idée serait aujourd’hui de ne pas en rajouter parce que cet établissement, je pense, a déjà été extrêmement fragilisé, fatigué et a payé un très lourd tribut par ce qui s’est passé. L’idée aujourd’hui, c’est de redonner confiance parce que je pense que nous pouvons le dire, nous faisons tout pour assurer sa pérennité. L’établissement a été aussi ébranlé socialement. Le personnel bien sûr qui a connu tous ces tourments a vécu des années extrêmement difficiles. Sur un plan juridique, comme nous l’avons expliqué, l’ACPR vient de rendre son jugement.
Nous avons un blâme, une sanction financière de 120 000 euros. Je pense que nous pouvons nous féliciter finalement d’avoir échappé au pire parce que nous aurions pu avoir un retrait d’agrément, nous aurions pu avoir une sanction financière beaucoup plus importante et à dire d’expert, nous étions plus proches des 500 000 euros que des 120 000 euros. Cela montre que quand bien même tous les griefs sont fondés puisque c’est ce qu’a dit l’ACPR, néanmoins, nous avons démontré que nous avions fait tout ce que nous pouvions pour remettre l’établissement sur des bons rails.
Nous avons aussi démontré tout le rôle social que joue le Crédit municipal, et ce en quoi chaque euro retiré au Crédit municipal est un euro en moins pour le CCAS, et je pense que c’est important de le dire. En tout cas, c’est ce que nous avons plaidé auprès de l’ACPR. Ce jugement étant rendu, nous ne sommes pas tout à fait au bout de l’histoire puisque d’autres procédures sont aujourd’hui en cours. Nous avons, d’une part, un contrôle de la Chambre régionale des comptes qui est en cours, qui est confidentiel, et dont a priori le rapport sera rendu public à la rentrée prochaine, en septembre-octobre. Nous savons qu’il y a une enquête en cours menée par le Procureur puisqu’il y a eu perquisition dans l’établissement, et là, c’est le secret de l’enquête.
Voilà, c’est tout ce que nous savons. Et puis, finalement, nous avons également déposé plainte contre X. Le Maire, en tant que Président du COS, a décidé de déposer cette plainte puisque nous estimons que tous les dysfonctionnements relevés sont au préjudice de la Caisse, et donc sont susceptibles de revêtir des qualifications pénales pour lesquelles nous souhaitons que justice soit faite, et qu’en tout cas, l’enquête soit menée le mieux possible. Voilà. Je pense que j’ai dit tout ce que je pouvais dire à date.
Claudine Bichet